Balade à Montzaigle
Avec un soleil encore voilé, huit membres de l’association se sont retrouvés dimanche 28 juin 1987 dès 14 heures pour une visite prospective du site de Montzaigle ( Montsaigles, Mont aux aigles….)
Objectifs : recherche succincte d’éventuels indices de la présence de souterrains et déambulation dans les environs de l’ex-route dite « stratégique » afin de mieux apprécier la topographie du lieu-dit.
Nous gagnons l’endroit dont Monsieur Berger venait de négocier diplomatiquement l’accès avec le gardien, lequel nous accueillit courtoisement et même nous accompagna quelques temps.
C’est qu’en fait une simple prospection de surface, l’idée était venue que les exploitations de gypse contemporaines pourraient peut-être avoir recoupé les galeries souterraines plus anciennes, et donc que leur visite pourrait être riche d’enseignement.
Nous voilà donc partis pour une incursion dans les carrières désaffectées, non sans avoir enchâssé des casques de chantier sur nos précieuses têtes, et ce en empruntant l’officiel chemin d’accès, assez boueux d’ailleurs.
Après deux cent mètres environ, sur la droite, on découvre une vaste ouverture, premier témoin de l’architecture gothique croisée qu’allait nous révéler la suite de notre cheminement.
Dès les premiers pas à l’intérieur, outre une fraîcheur autant inattendue que bienvenue, on est saisi par les dimensions impressionnantes des excavations dont la hauteur excède le décamètre. Le réseau de galeries, approximativement à mailles carrées, est entièrement réalisé dans la haute masse de gypse saccharoïde, le plus facile à exploiter, tant au niveau de l’extraction qu’à celui de la transformation en plâtre par chauffage à 200° environ ( four à bois de l’époque).
Bien que nous ne soyons restés que peu de temps, et malgré des moyens techniques d’investigation assez limités, nous avons pu apprécier la méthode des carriers de l’époque ainsi résumée :
1-le carrier amorce le creusement en haut de la strate gypseuse en ménageant une couche d’un mètre, en guise de plafond. Il dispose des poutres de bois en travers du boyau qu’il creuse (1 à 2 mètres de largeur), pour soutenir la clef de voûte naturelle et servir de témoin de mouvement de roche.
2-le boyau initial s’allongeant, le carrier empile les gros blocs en formant un caisson réceptacle dans lequel tous les petits blocs et éclats sont entassés avant d’être acheminés à dos d’homme par d’autres ouvriers.
3-la progression se poursuivant, le plancher de la galerie d’extraction est peu à peu élargi et abaissé. Il en résulte une section ogivale de la galerie, et la formation d’un plan incliné facilitant l’accès au front de taille et l’acheminement du gypse vers l’extérieur. De plus, tous les vingt mètres environ, de nouvelles galeries initiatrices sont amorcées, perpendiculairement à la précédente créant un réseau d’exploitation maximale en épargnant des piliers et murs de soutènement dans la masse même du gypse.
4-peu à peu la colline de Montzaigle est totalement minée, l’exploitation est alors abandonnée. Elle sera reprise, plus à l’ouest, sous forme de carrière à ciel ouvert qui permet l’accès à tous les bancs de gypse, y compris les strates mineures( pied d’alouette, fer de lance). Les lieux sont ensuite réinvestis par une industrie de type agro-alimentaire : champignonnière. Il en reste de nombreuses traces, notamment canalisations d’eau, circuits électriques, emballages de « blanc de champignon » et sacs de fumier.
fouilles 1986/87
exemples de gypse fer de lance conservés au musée
Nous sortons de la carrière par une issue dotée d’un escalier et poursuivons la visite, en surface cette fois. Il règne une haleur plombée quelque peu étouffante qui ne nous empêchera pas de gravir la colline dans une végétation peu accueillante, jusqu’à gagner la route stratégique ou plutôt ce qui en reste.
Au niveau du clos de Montzaigle, qui apparaissaient déjà comme vergers ceintes de bois sur les plans de 1760, nous examinons le terrain, en quête de traces d’édifices quelconques, murets, tessons de poteries et autres indicateurs du passé. Nous retiendrons le tracé d’un chemin en dépression, bordé de talus… vraisemblablement très ancien et qui semble descendre vers Villeparisis en passant par le château (?). Bien qu’en grande partie engloutie par les travaux de l’A104 ce chemin mérite d’être arpenté et sondé au détecteur de métaux.
Nous sommes repartis vers l’est en longeant l’effondrement des anciennes carrières vers les Grands-Bois, dont certaines entrées sont encore accessibles… et devraient être soigneusement visitées, s’il y a bien des souterrains vers Claye-Souilly, et si les carrières les ont recoupés, c’est dans les galeries les plus à l’est qu’il faut les chercher.
Rapidement nous avons retrouvé les autres accès, en nous déplaçant sur un terrain irrégulier laissant penser qu’il s’agit de l’effondrement d’une partie du réseau de carrières (?), quelques impressions et hypothèses.
De futures prospections, plus poussées, sont à organiser dans ce secteur afin de mieux en percevoir ses antécédents.
Madame Jeanne Marlé
article tiré de "Vespa" n°1 Septembre 1987, publié dans Villeparisis Souvenirs